le cours des choses

Notes à la marge

Notes sur Trump (5/c) , au fil des nominations...

Publié le 3 Janvier 2017

Lo Stato imperialista delle multinazionali ?

Il pourrait être tentant de sortir de la naphtaline ce concept fourre-tout («  l'État devient une fonction spécifique du développement capitaliste dans la phase de l'impérialisme des multinationales ; il devient : État impérialiste des Multinationales »). des brigades rouges pour évoquer la nomination du patron d'Exxon Mobil, Rex Tillerson au poste de secrétaire d'État. Steve Coll, auteur de Private Empire : Exxon Mobil and American Power, définit d'ailleurs Exxon comme une « entreprise-État », « la concentration de pouvoir non-élu la plus importante du monde occidental » qui se « considère comme une entité souveraine » et mène sa propre politique étrangère dans pas moins de 200 pays.

Toutefois, il ne faut pas se méprendre non plus sur cette super-puissance, la belle époque du cartel des sept sœurs est tout de même révolue. Si le dit cartel contrôlait dans les années 50, 80% des réserves mondiales de pétrole, on estime aujourd'hui que 90% de celles-ci sont contrôlées par des sociétés nationales, ce qui rend les grands groupes privés toujours plus dépendants des gisements les plus difficiles à exploiter ( comme en Arctique, où Obama vient in extremis d'interdire l'extraction off-shore).

Certes, le vent a un peu tourné dernièrement avec l'effondrement du pétro-socialisme vénézuélien , la perte relative d'hégémonie de l'OPEP, et quelques projets de privatisation partielle ( PEMEX au Mexique, Saudi Aramco, etc). De même, la tentative saoudienne de pousser les producteurs de gaz et de pétrole de schiste américains à la faillite en maintenant les prix sous les 50$, a pour l'instant échoué grâce à une réduction drastique des coûts et des gains de productivité, notamment via l'adoption de certaines méthodes empruntées à la « lean production ». Une version « light » de l'« indépendance énergétique » américaine (impossible dans l'absolu, les États-Unis importent encore 7 millions de barils par jour) vantée par Trump, pourrait effectivement voir le jour et donc modifier relativement la « donne impérialiste », ce à quoi Rex Tillerson viendrait donc présider. Mais tout comme l'État ne se résume pas à une courroie de transmission des multinationales, les relations internationales ne s'expliquent pas non plus en dernière instance par une guerre plus ou moins larvée pour l'accès aux ressources fossiles. Certes, le grand jeu « est un autre »...

 

Annexe : feu le vert cocardier

De même que la domination du commerce mondiale par les grandes firmes multinationales, dont les chaines de valeur n'ont cessé de se globaliser cette dernière décennie, interdit que les rodomontades protectionnistes portent plus que cela à conséquence, les rêves d'empowerement national par la vertu écologique sont amenés à buter sur la dure réalité du capitalisme mondial.

L'article Going Green to Stay in the Black: Transnational Capitalism and Renewable Energy de Jerry Harris paru dans Race & Class en 2010 rappelait l'enthousiasme qui avait encore cours à l'époque, avec Obama déclarant dans son discours de l'union  : «  La nation qui sera leader sur l'économie des énergies propres sera la nation qui sera leader de l'économie globale et l'Amérique doit être cette nation  »  De même l'éditorialiste Thomas Friedman, un des vulgarisateurs les plus doués du capital, qualifiait les énergies vertes de nouvelle monnaie du pouvoir, considérant leur développement comme nécessaire «  au pouvoir de la nation...qu'est-ce-qui pourrait être plus patriotique, capitaliste et géostratégique que cela  ?  »

Mais Harris notait déjà  : «  Ces rêves de grandeur nationale sont déjà dépassés. Les énergies vertes peuvent prolonger la vie du capitalisme mais pas dans le carcan d'une logique de pouvoir centrée sur la nation. Les principales firmes du solaire et de l'éolien opèrent d'ores et déjà sur une échelle globale, avec des innovations et des recherches qui ont lieu simultanément en Europe, en Inde, au Japon, en Chine et aux États-Unis.  »